Sur le site de Faladiè Grabal, nous rencontrons une réalité poignante: des personnes déplacées internes (PDI) du Mali, cohabitent dans un environnement désigné initialement comme un marché à bétail. “Galbal”, désigné en Foulfouldé et Grabal, une appellation faite en Bamanakan et “Marché à bétail” en Français, illustre la fusion amère entre la vie humaine et le commerce animalier. Cette situation est causée par la crise sécuritaire de 2012, qui a provoqué un déplacement massif depuis le centre du Mali, notamment Mopti, vers certaines régions du Mali en plus du district de Bamako spécifiquement.
Le Gouvernement malien reconnaît plusieurs sites d’accueil pour les PDI, dont Faladiè Galbal, Sogoniko, Cenou et Niamana. Notre étude s’intéresse à celui de Faladiè Grabal, où l’unité de recherche de V4T Académie a mené une enquête approfondie en mai 2023 pour mettre en lumière les réalités de ce site.
Les conditions de vie des PDI sur le site de Faladiè
Les PDI sur le site de Faladiè Grabal à Bamako font face à des défis majeurs qui aggravent leur situation de vulnérabilité, affectant considérablement leurs conditions économiques, sociales, voire psychologiques. Ces personnes vivent dans un environnement d’insalubrité accentué par la coexistence avec un marché à bétail et des montagnes d’ordures, entraînant une exposition à divers risques sanitaires. Le manque d’accès à des installations sanitaires adéquates et à de l’eau potable aggrave ces conditions.
La sécurité est une préoccupation constante, notamment due à l’absence d’éclairage et de surveillance adéquate. Les femmes et les jeunes filles sont particulièrement exposées à des risques élevés de violence. En plus, la proximité des montagnes d’ordures offre un refuge aux délinquants sexuels, qui profitent de l’obscurité pour agresser les femmes et les filles se rendant aux toilettes. Cette menace de viol ajoute une couche supplémentaire de terreur à leur quotidien déjà précaire.
L’insécurité alimentaire demeure une lutte au quotidien, avec un accès insuffisant à une alimentation adéquate, exacerbant la malnutrition et les problèmes de santé associés. Par ailleurs, la pauvreté extrême pousse certaines femmes à recourir à la mendicité et à la prostitution comme moyen de survie, les exposant à un risque accru de violence, d’exploitation et de maladies sexuellement transmissibles.
Hébergement sur le site
Lors de notre étude sur le site des personnes déplacées internes (PDI) à Faladiè Grabal à Bamako, nous avons constaté que l’hébergement représente un défi majeur pour les occupants. Ces derniers se trouvent contraints de vivre dans de petites tentes surpeuplées, conçues pour accueillir entre cinq et dix personnes. Tolo A., une ménagère de 35 ans originaire de Mondoro et elle-même PDI, témoigne de ces conditions difficiles : « Il arrive que deux familles partagent la même tente. Cette situation est très difficile pour nous. Si nous pouvions trouver une solution à ce problème, cela améliorerait grandement notre quotidien. »
Ramassage de déchets plastiques
Il est crucial de souligner que les femmes du site de Faladiè Grabal assument les responsabilités de certaines dépenses familiales, vivant du ramassage de déchets en compagnie de leurs enfants. Ces femmes gèrent les dépenses liées à la nourriture, à l’éducation et aux soins de santé. Barry O., une femme déplacée de Mondoro, nous affirme ceci: « Nous sommes venues ici il y a deux ans, nous commençons nos journées à 6 heures du matin, nous et nos enfants partent collecter des bidons et des ferrailles de faible densité dans les déchets. La vente de ces matériaux peut nous rapporter entre 1000 et 1500 francs CFA par jour, ce qui nous permet de survivre. »
Ces femmes font face à diverses adversités telles que le risque de viol, de maladies, d’accidents et de marginalisation lors de leurs quêtes quotidiennes de subsistance. Certaines ont bénéficié de formations sur la conservation du lait et sur la transformation du sorgho. Malgré les aides gouvernementales et celles de quelques ONG, les ressources demeurent insuffisantes, les poussant à continuer cette vie précaire.
L’activité professionnelle menée par les hommes
L’enquête a démontré que nombreuses des personnes déplacées internes sur le site de Faladiè précisément les hommes ont perdu leurs premiers emplois à leur arrivée à Bamako. L’activité professionnelle menée par les hommes avant leurs arrivées était l’élevage, l’agriculture, la pêche, et le commerce. Cependant, à leurs arrivées, certains ont changé directement de profession, d’autres sont restés dans la même activité professionnelle, par contre, certains ont totalement perdu leurs emplois. Selon Diallo A., personne déplacée interne venue de la région de Douentza dans le village de Boni, commerçant, âgé de 35 ans nous confirme ceci dans ces propos : « Avant lorsque que j’étais dans mon village à Boni, je faisais l’agriculture et l’élevage, je ne gagnais pas assez, mon revenu est différent de mon arrivée à maintenant, car avant j’étais dans ma famille, j’avais de l’argent, mais maintenant j’ai tout perdu je suis là uniquement à attendre les aides venant d’autres personnes. »
C’est ainsi qu’ils ont mis en place des moyens pour pallier leurs difficultés financières par rapport à la mise en place des Tontines une somme de 250f et de 500f. L’argent de la tontine qui est de 250f, est utilisé pour l’entretien de la toilette, et quelques petits entretiens du site. Pour les 500F l’argent est utilisé pour des cas sociaux à savoir si une personne se trouve dans l’incapacité de satisfaire ses besoins vitaux.
L’activité professionnelle menée par les femmes
Il est important de noter que les femmes qui sont le site de Faladiè Grabal sont à la charge des dépenses familiales. Ils vivent par le ramassage des déchets du site en compagnie de leurs enfants. Selon les réponses recueillies durant l’enquête, les femmes nous confirment qu’elles sont en charge des dépenses familiales, la nourriture, les frais de scolarité et les prises en charge sanitaires sont à la charge des femmes. Selon Barry O., femme déplacée de Mondoro nous affirme ceci : « Nous sommes venues ici il y a deux ans de cela, très tôt le matin à 06h00, nous et nos enfants on sort pour aller vers les ordures et chercher des bidons et des fers usés de faibles densité, si on parvient à vendre cela, dans la journée on peut gagner 1000F ou 1500F c’est ainsi qu’on se débrouille pour vivre. »
Il faut reconnaître que certaines d’entre elles ont bénéficié des formations sur la conservation du lait, et d’autres petites formations sur la transformation du sorgho. Elles bénéficient des aides venant des du gouvernement et de quelques ONG, mais cela s’avère insuffisant pour ces femmes, elles préfèrent ajouter la vie de l’ordure à celle de leurs vies normales.
À quand la fin de cette misère ?
La situation critique des personnes déplacées internes soulève une question urgente : « À quand la fin de cette misère ? » Les défis auxquels ces individus font face, notamment l’insalubrité, l’insécurité, la faim, et le surpeuplement des hébergements, illustrent un quotidien de lutte pour la survie. Confrontés à la perte d’emplois et à des conditions de vie précaires, les résidents, y compris les femmes et les enfants, sont souvent poussés vers des moyens de subsistance dangereux, voire dégradants.
Cette réalité alarmante exige une action concrète, coordonnée et rapide des autorités, des organisations humanitaires, et de la communauté internationale pour développer des solutions durables. Celles-ci devraient non seulement répondre aux besoins immédiats en matière de sécurité et de services de base mais aussi favoriser l’intégration économique et sociale des PDI. La fin de cette misère repose sur un engagement ferme à améliorer les conditions de vie et à restaurer la dignité et l’espoir parmi ces communautés vulnérables.